Andrew Stanton était à Londres le 9 novembre dernier pour présenter des extraits de John Carter à la presse européenne. Jack Danté y était et a pu assister à la présentation avant de rencontrer le réalisateur pour le compte de Fantasy.fr.
Andrew Stanton : La première véritable aventure de John Carter a été publiée en 1912 dans All-Story Magazine. Chaque mois Edgar Rice Burroughs proposait un nouveau chapitre de John Carter qui finissait par un rebondissement. Ces romans ont été écrits de manière feuilletonesque et il fallait environ deux ans pour que l’histoire de A Princess Of Mars soit dévoilée entièrement au public. Personnellement j’ai découvert John Carter non par les romans, mais par leur adaptation en comics de 1977 à 1979. J’ai ensuite découvert la dizaine de livres dans lesquels apparaissaient John Carter et je les ai tous lus au lycée. Ma copine de l’époque me disait que c’était mes « Harlequin » pour mec ! Je ne me suis jamais replongé dedans jusque vers la fin de ma vingtaine, alors que je travaillais déjà pour Pixar. J’ai alors souvent espéré que quelqu’un en ferait un film et que je pourrais aller le voir, juste en tant que fan. Ça ne m’était pas venu à l’idée de le faire moi-même.
Andrew Stanton : En 2006, alors que je réalisais Wall-E, j’ai rencontré Mark Andrews (Les indestructibles, Brave) et nous nous sommes découverts la même passion pour John Carter. Même chose deux ans plus tard avec Michael Chabon ; ce qui m’a décidé à avancer sur le projet car j’ai tout de suite pensé que nous serions meilleurs à trois pour l’écriture que tout seul. Une fois l’écriture terminée – bien sûr, je trouvais le script génial – j’ai décidé de trouver un acteur pour incarner John Carter et convaincre le studio.
Andrew Stanton : J’ai montré à quel point j’étais passionné par le projet, je l’ai défendu au point où ils se sont dit que c’était forcément une bonne idée ! J’ai aussi eu de la chance car Wall-E venait de sortir, donc tous les acteurs acceptaient de me voir ! J’ai rencontré des centaines de personnes jusqu’à ce que je tombe sur la série Friday Night Lights et découvre Taylor Kitsch. Je le trouvais un peu jeune même si j’aimais son style de jeu. J’ai longuement hésité jusqu’à ce que je réalise qu’Harrison Ford avait 34 ans lors du tournage de Star Wars, Christophe Lambert 29 ans pour Highlander, Sean Connery 32 ans pour Dr No, De Niro 30 ans dans Le Parrain 2. Taylor ayant 30 ans, je me suis dit : « Il y est » ! Quand je l’ai vu dans Wolverine, il m’a convaincu qu’il pouvait le faire. Je lui ai quand même fait passer plusieurs tests pour vérifier si l’énergie que j’avais pu détecter en lui passait pour ce personnage sur grand écran.
Andrew Stanton : C’est un peu comme monter sur un voilier pour faire le tour du monde, tu sais que tu vas voir des arcs-en-ciel, des dauphins et des dizaines de choses magnifiques, mais tu sais aussi que tu vas avoir des journées de merde ! Tu signes pour ça, tu sais que ça va être une expérience incroyable et qu’il faut que tu la vives.
Andrew Stanton : J’étais très heureux de le faire au point que les deux autres personnages principaux – créés en 3D – sont aussi interprétés par de vrais comédiens. Les grands acteurs sont capables de grandes performances en tout cas plus facilement que des personnages animés ! Ils apportent un vrai plus et surtout un vrai regard. Les yeux sont très importants en animation et ceux des acteurs nous ont servi de base pour les créatures qu’ils jouaient. Ça ajoute également un côté instinctif, une spontanéité que l’on n’a pas en animation, un domaine où l’on passe son temps à tout réfléchir. La présence de véritables comédiens sur le plateau permet aussi aux autres de jouer plus naturellement car il y a une vraie présence, ils peuvent se regarder droit dans les yeux. Il y a aussi de nombreuses expressions, des reflexes, des muscles du visage qui se contractent ou se détendent inconsciemment que l’on peut reproduire ensuite sur la créature en 3D et qui ajoute du réalisme. Ces choses là, vous ne les faites pas si vous êtes seul et que vous devez imaginer un personnage qui n’est pas là. Un grand animateur ne remplacera jamais un grand acteur, mais en combinant les deux on obtient une créature virtuelle réussie.
Andrew Stanton : Exactement, les acteurs qui incarnaient ces créatures portaient des pyjamas verts de motion capture et ils étaient filmés avec les mêmes caméras qu’Avatar comme celles prenant exclusivement les mouvements du visage. Je vous avoue que certains jours, quand je voyais le plateau avec les décors, les acteurs, plus ces types en vert, certains sur des échasses, se baladant partout, je me demandais vraiment ce que j’étais en train de faire ! (Rires)
Andrew Stanton : Je pensais que ça allait être très dur car les conditions étaient particulières puisque nous tournions en plein désert. Finalement les comédiens – surtout ceux portant les habits verts pour les effets spéciaux – ont pris ça comme un défi et ça s’est bien passé malgré la température.
Trouver le méchant ! En relisant le premier roman, je me suis aperçu qu’il n’y avait pas d’ennemi majeur. Comme on dit souvent qu’un héros est à la hauteur de son ennemi, il me fallait une menace forte incarnée par un personnage charismatique. Je suis allé le cherché dans l’un des romans suivants et j’ai fini par trouver le bon antagoniste. Je suis allé alors chercher Mark Strong qui pour moi est l’un des meilleurs acteurs pour ce genre de rôle à l’heure actuelle.
Andrew Stanton : Effectivement. C’était là encore un autre challenge. Je suis allé chercher Nathan Crowley, le directeur artistique de films comme The Dark Knight et Public Ennemies. Je l’ai choisi car il est extrêmement doué, mais aussi parce qu’il n’avait jamais travaillé sur des films fantastiques et que je cherchais un regard neuf. Nous avons beaucoup travaillé sur le fait qu’il fallait donner à cette planète la sensation qu’elle a une histoire beaucoup plus ancienne que la nôtre. Elle devait avoir traversé des époques que nous ne connaissons pas encore sans tomber dans l’imagerie des jeux vidéo futuristes. Fallait-il s’inspirer des civilisations mayas ou asiatiques ? Je n’en savais rien. Tout ce que je savais c’est qu’il fallait placer des éléments architecturaux massifs dans des paysages désertiques grandioses et montrer qu’ils avaient souffert des éléments durant des siècles. Au final le but était de croire en ce monde, ces créatures, cet environnement unique.
Andrew Stanton : Ces quelques journées ont eu lieu alors que le montage était presque terminé. J’ai ainsi pu voir ce qu’il n’allait pas et ce qu’il fallait faire pour améliorer le film. Ça peut sembler mauvais signe pour certains, mais dans l’animation j’ai appris à retourner les scènes autant de fois qu’il le faut. En général en deux ou trois ans de production, nous tournons le film quatre fois. C’est pour ça que les Pixar sont bons. Le cinéma n’est pas une science exacte. Bien sûr je n’allais pas retourner le film quatre fois, mais j’avais la possibilité de l’améliorer alors je n’allais pas le laisser dans une version qui ne me convenait pas. J’ai la chance de travailler pour un studio qui a compris qu’il n’y avait pas que l’économie qui comptait, mais qu’il fallait aussi laisser les artistes se planter et recommencer si besoin.
Andrew Stanton : Je me suis posé la question et finalement j’ai opté pour celle en postproduction car c’était déjà assez compliqué de le tourner en 2D. Le procédé de création de la 3D en postproduction est arrivé à maturité et fonctionne très bien comme j’ai pu le voir sur les derniers films Pixar. J’ai hâte de voir les ressorties de Titanic ou de La menace fantôme en 3D pour voir ce que les techniciens ont réalisé sur ces films.
Andrew Stanton : Le studio a acheté les droits des trois premiers romans de John Carter. Je ne suis pas le genre de personne à envisager une suite avant que le film ne soit terminé, mais ironiquement, nous avons prévus les suites. Comme les romans sont construits comme des suites les uns des autres, j’ai décidé d’avancer dans ce sens. Bien sûr, j’ai construit le premier film de manière à ce que celui-ci se suffise à lui-même. Je ne m’attends pas à ce qu’un studio mette de l’argent sur la table pour trois films avant que le premier ne soit sorti. Ecrire les deux autres films a été pour moi un exercice d’écriture plus qu’autre chose. Si rien ne se fait après, je n’aurai pas de regrets, mais si je peux tourner deux autres films, je serai ravi.
Joseph Gordon-Levitt et Bruce Willis réunis comme on ne s'y attendait pas.
D'après Stephenie Meyer.